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Une expérience spéculative du présent

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Une expérience spéculative du présent

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Sous ses allures de fable technopoétique, Sayonara jette un éclairage sur les contradictions profondes d’un système sociotechnique dans lequel la technologie, loin de bouleverser l’ordre établi, sert souvent à reconduire des hiérarchies sociales déjà existantes. Le robot n’est pas ici une figure de science-fiction futuriste, mais le miroir discret d’un monde contemporain en recomposition, où les logiques de genre, de travail et de soin continuent d’opérer sous une nouvelle forme, machinique.

Pourtant, Hirata ne cède ni à l’alarmisme dystopique ni à l’enthousiasme solutionniste. Comme le souligne Francesca Spedalieri, l’auteur opte pour une esthétique de la sobriété : il installe les robots dans un univers quotidien, banal, dénué de spectaculaire, ce qu’elle qualifie de minimalist realism. Ce choix dramaturgique permet un déplacement subtil mais fondamental : le robot ne renvoie pas à un avenir hypothétique, mais à une actualité déjà en cours, marquée par l’automatisation diffuse, l’épuisement émotionnel et les attentes genrées.

Ce glissement est au cœur de la force critique de Sayonara. Le malaise que suscite la pièce ne naît pas d’un choc frontal avec l’inhumain, mais d’une proximité troublante, d’un frottement doux avec un présent légèrement altéré. En insérant le robot dans un quotidien familier — celui des soins, de la mort, de la récitation poétique — Hirata révèle que ces présences ne sont pas à venir : elles sont déjà parmi nous, intégrées et fonctionnelles.

Le spectacle ne se contente pas d’illustrer un changement social : il en fabrique les conditions sensibles, en plaçant les spectateur.ices face à l’intimité spéculative d’une cohabitation possible avec des entités autre qu’humaines. Ce choix dramaturgique confère à l’œuvre une puissance réflexive rare : Sayonara ne propose ni utopie ni effroi, mais une expérience spéculative du présent, où les spectateur·ices sont invités à reconsidérer les mutations sociotechniques en cours non pas comme des ruptures, mais comme des continuités discrètes.

Contenu à relier / annoter (ressource physique, actant, conceptuelle)

I, Worker - Scène du spectacle avec Yuuji, Momoko Robovie R3 et Ikue

A comme contenu relié / annoté (ressource physique, actant, conceptuelle)

Quietly Posthuman: Oriza Hirata's robot-theatre

Technocare

Théâtre

Robot

Technospiritualité

E-mail de la personne ayant créé cette relation / annotation

Julie-Michèle Morin

A comme collection ARCANES

IA, pratiques narratives et arts performatifs